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QUELLE SOBRIÉTÉ NUMÉRIQUE POSSIBLE À L’HEURE OÙ LE NUMÉRIQUE SE DÉPLOIE À GRANDE ÉCHELLE ?

Le numérique (tous secteurs confondus) est aujourd’hui responsable de près de 3,5 % des émissions mondiales des gaz à effet de serre. A titre d’exemple : le nombre total de mails envoyés et reçus par jour dans le monde était de plus de 306 milliards en 2020.

Selon l’organisation Carbon Literacy Project, un mail standard génère environ 4 g de CO2  et avec une pièce jointe volumineuse, il produit jusqu’à 50 g de CO2. Faites donc le calcul… Si les établissements de santé sont déjà fortement engagés dans une démarche « verte » pour réduire leur impact sur l’environnement (énergies renouvelables, rénovation de bâtiments moins énergivores, recyclage des déchets…), comment cela peut-il s’appliquer à l’utilisation du numérique ?

Par Camille de La Tullaye, Consultante WELIOM

Aujourd’hui en France, il n’existe pas de calcul précis, ni d’indicateur objectif et vérifiable de l’impact carbone du numérique en santé. Ceci pour plusieurs raisons mais une des principales étant que les bilans carbones que les établissements ont l’obligation de réaliser ne prennent souvent en compte que les scopes 1 et 2 d’émission qui sont les seuls obligatoires. Or les éléments inclus dans le scope 3 seraient nécessaires pour avoir une vision détaillée de l’impact carbone du numérique en santé

On sait cependant d’après l’ADEME et l’ARCEP que l’impact environnemental du numérique en général est principalement lié aux terminaux (de 65 à 92%) notamment à leur fabrication, aux datacenter (4 à 20%) et aux réseaux (4 à 13%). Ensuite, le développement de l’utilisation du numérique en santé, dont les avantages ne se discutent plus, est largement promu par le gouvernement français, notamment avec des programmes comme le SEGUR, l’ESMS Numérique… Or cette augmentation de l’utilisation du numérique va de facto entrainer une augmentation de son impact carbone. 

Alors comment peut-on limiter cet impact et parler de sobriété numérique à l’heure où le numérique se déploie à grande échelle ?

Le système de santé public britannique s’est engagé à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. En France, les établissements commencent à prendre le sujet en main. Le CHU de Bordeaux a mis en place un certain nombre d’actions pour contribuer à la réduction de son empreinte carbone : tri des déchets informatiques, mise en place d’un circuit de recyclage du matériel informatique sous forme de don à des associations, ajout de points de numérisation à différents endroits de l’établissement pour éviter les photocopies… Des initiatives voient le jour. Les signataires du manifeste Planet Tech’Care, dont WELIOM fait partie, s’engagent à mesurer puis à réduire les impacts environnementaux de leurs produits et services numériques. Les instances françaises contribuent également. L’ANAP, par exemple, propose un accompagnement pour les établissements (5 jours in situ), une plateforme a été mise en ligne, un réseau des conseillers en transition énergétique et écologique en santé créé et l’intégration du développement durable au référentiel MaturiN-H avec l’écoscore SIH est prévue. 

Il s’agit donc de consommer le numérique le plus « efficacement » et « utilement » possible et de suivre une éthique du numérique en santé. Pour cela, il est nécessaire d’avoir une bonne gestion du rapport bénéfice / risque dans l’utilisation du numérique en santé. Ce sujet est pris en compte formellement par le gouvernement depuis 2019 avec le plan Ma Santé 2022 sur les thèmes principaux suivants : l’éthique des applications en santé, des cabinets, des établissements, des services sociaux et médico-sociaux. Pour un établissement de santé, la problématique de l’empreinte liée au numérique est proche de celle des grandes industries. Elle nécessite la gestion et l’optimisation d’un parc souvent important

Aussi, la réflexion et l’action doivent se portent à plusieurs niveaux :

  • L’achat : acheter durable et s’assurer que le remplacement du papier par le numérique a un impact positif, notamment en faisant attention à la construction du matériel, à son acheminement…
  • L’usage : mettre les ordinateurs en veille lorsqu’ils sont inutilisés pendant un certain temps, s’assurer de la pertinence des soins et de l’utilisation du numérique liée, sans pour autant tomber dans la limitation des soins…
  • L’évolution du parc : renouveler le parc le moins souvent possible pour éviter de la surconsommation, tenter d’aller vers des logiciels qui n’impliquent pas d’acheter de nouvelles machines, trier les déchets informatiques et recycler les ordinateurs qui ne peuvent plus être utilisés, donner une « seconde vie » au matériel… 
  • La formation : inciter les utilisateurs à un usage écoresponsable, préconiser sans imposer

Des leviers existent pour passer à l’action et diminuer l’impact du numérique en santé mais tendre vers une sobriété numérique dans une monde hyperconnecté relève de la gageure. Les notions de « numérique inclusif » et de « sobriété numérique » sont antinomiques car la première implique que tout le monde soit équipé en smartphone, ordinateur et/ou tablette coûteux, polluants et énergivores, et sache s’en servir. Or la base de la sobriété est la non-consommation. Et la base de l’inclusion est de fournir un service réellement accessible à tous. 

Alors « Décarboner la santé » oui, mais une véritable politique doit être mise en place en incitant chaque acteur à « l’écoresponsabilité ». Ce n’est que grâce au collectif que les choses avanceront….

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